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En toute inquietude
[ Jean-Luc Piraux ]
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En toute inquietude
un récit à la première personne

Présentation écrite par Laurent Ancion

Comment raconter le père ?

On rêverait tous de pouvoir mettre des mots sur les ailes et les filets que nous lègue l’auteur de nos jours. Tout à la fois héros et ennemi, double et contraire, la figure du père est de celles qu’on gère toute une vie, sans jamais résoudre entièrement sa bizarre équation.

La particularité du travail de Jean-Luc Piraux est de se fonder sur cette énigme sans rien céder au psychologisme ni au journal intime. Il fait du père la figure du héros, c’est-à-dire le personnage central du récit. Séraphin est bien ce « personnage légendaire auquel on prête un courage et des exploits remarquables », selon la définition consacrée, et ce sont ces exploits-là qui constituent la fable. Les défis du héros ne concernent pas la Guerre de Troie, mais presque : les batailles menées par Séraphin, qui se débat avec son quotidien, valent bien le récit de luttes antiques avec les hommes, la famille et le destin. Et comme tout héros dont l’histoire mérite d’être racontée, c’est aussi par ses faiblesses que se révèle ce père-là. Et ses failles, bien sûr, nous font rire, parce qu’on les reconnaît et qu’on n’a pas envie d’y tomber.

Comment raconter le père ? En ne cachant pas qu’on est un fils. Si le personnage paternel forge le « coeur » de la fable (et donc le terreau où chacun pourra se reconnaître), le « corps » du spectacle s’articule sur le défi du fils de parler de – et pour – celui qui ne parlait guère de lui. « En toute inquiétude » met des mots là où il y avait le silence. A cet égard, le premier personnage du spectacle, c’est le narrateur luimême. Il est celui qui doute, qui essaie, qui convoque les outils du théâtre (voix, silhouettes, personnages, paroles et silences) pour donner à voir ce qui était jusque-là resté invisible. Et c’est tout un petit monde qui surgit alors, comme si chacun, de l’épouse aux enfants, des amis de comptoir aux collègues de travail, venait livrer son petit bout de vérité, fatalement subjectif, donc touchant.

C’est à nous, spectateurs, qu’il revient de tricoter ces bouts de laine, ces bouts de l’âme d’un bonhomme dont le portrait éclaté prend peu à peu valeur de quête absolue : celle d’une réconciliation. En tant qu’auteur et acteur, Jean-Luc Piraux a la tendresse pour guide. En nos temps pressés, un tel cheminement pourrait apparaître comme un détour. Mais c’est précisément par les chemins de traverse qu’il nous livre ici son spectacle le plus personnel et le plus universel.

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